QUESTIONS:
(…) Depuis petite, mon seul but dans ma vie est d’être aimé et aimé quitte à en mourir , la seule et unique chose qui donne du sens à ma vie et me fasse sentir exister c’est être aimé et aimé(…) et je ne peux pas vivre avec la personne que j’aime. (…) Du coup, je suis dans le combat, en colère noire, et je me demande à quoi bon vivre sans avoir une envie de vivre?
Les choses arrivent par elle-même, alors pourquoi sommes-nous dans le rejet de ce qui arrive?
Le rejet de ce qui arrive, c’est aussi une chose qui arrive par elle-même.
A quoi bon vivre sans avoir une envie de vivre ?
En gros, la question est un peu comme celle d’un enfant capricieux (en tout cas, je te suggère de la regarder sous cette angle, comme ça tu pourras mieux comprendre le non-sens de la question). C’est un peu comme si cet enfant capricieux, à qui on refuserait un jeu vidéo demandait : à quoi bon vivre si ce n’est pas pour avoir et faire ce que je veux comme je veux ? C’est clairement l’égo, la personne qui voudrait vivre uniquement selon ses règles, ses conditions, ses envies, ses désirs, ses requêtes,… « Je veux que la vie soit comme ça et pas autrement et sinon, je ne veux pas la vivre ! »
Peut-on par nous-même reconnaître notre impuissance (dire oui ok je suis impuissante , ce qui est vrai, mais j’ai pas envie de le reconnaitre)? Je me sens trahie par la vie , par Dieu lui-même.
En effet, un peu comme cet enfant capricieux se sentirait trahi par ses parents s’ils ne lui achetaient pas ce qu’il veut (par exemple un jeu vidéo) parce qu’il serait convaincu de ne pouvoir être heureux qu’avec ce jeu et que sans, il serait condamné à être malheureux. En plus, il dira que les autres ont ce jeu et que c’est injuste. Il pensera que si lui ne l’a pas, c’est que ces parents sont de mauvais parents. De la même façon, en n’obtenant pas ce que tu veux comme tu le veux, tu te sens trahi par Dieu, par la Vie.
À force de tout essayer pour obtenir ce que tu veux, en vain, il est possible que cette impuissance se reconnaisse, oui. Mais, bien sûr qu’il n’y a pas l’envie de le faire, sans quoi ce serait « se rendre », « abdiquer » et donc perdre tout espoir d’obtenir ce qu’on désir et qui, au-delà d’être un désir représente « l’objet » qui nous rendra enfin heureux. C’est donc comme abandonner l’espoir de notre propre bonheur, c’est pour ça que c’est si difficile.
Or, bien entendu, le bonheur que nous cherchons ne se trouve ni dans le jeu vidéo, ni dans le fait de trouver le prince charmant. Ce sont des illusions mentales qui nous font croire que ce n’est que lorsqu’on aura obtenu ceci ou cela qu’on pourra être heureux. Et c’est comme ça depuis notre enfance. Les objets sur lequel nous projetons notre bonheur changent, mais le fonctionnement est le même et c’est ce fonctionnement en entier qu’il faut remettre en question parce qu’il semble nous amener plus de désespoir et de malheur qu’autre chose, il faut le voir. Regardez comment chaque objet obtenu (et je dis objet de manière générale, ça peut être un emploi, une personne, un résultat…) ne peut nous satisfaire que durant une très courte durée. Après, il faudra de nouveau se mettre en quête d’autre chose pour retrouver ce soi-disant bonheur. Quand celui-ci ne nous déçoit pas directement. Regarde comment nous dépensons un maximum d’énergie, comment nous consacrons un maximum de temps pour obtenir ce qui, finalement, ne va pas nous apporter ce bonheur tant espéré. Car, si nous y regardons de plus près, nous voyons que ce « bonheur » éphémère, qui est ressenti lorsqu’on obtient ce qu’on désire, n’est qu’un pseudo bonheur, c’est une sorte de satisfaction, mais on est tous capable de reconnaître (en regardant nos expériences passées) qu’il ne s’agit pas du « vrai bonheur ». On passe à côté de ce qu’on cherche vraiment. On peut tous voir très clairement que ce que nous convoitons ne pourra jamais nous amener le pétillement qui se trouve dans les yeux des enfants.
Parfois, nous avons la chance d’y goûter malgré nous et parfois, certaines situations nous poussent à cette rencontre, mais malheureusement, le mental, à nouveau, se met à nous dire que c’est grâce à tel ou tel objet et, tout de suite, il crée une nouvelle quête vers ce bonheur. Pour reprendre l’exemple de l’enfant, c’est comme si quelques jours plus tard, alors qu’il n’a toujours pas obtenu ce jeu vidéo, il fait une balade dans les bois avec ses parents, oublie ses désirs, ses idées et sa quête de bonheur et se met simplement à profiter et vivre l’instant de cette balade. Il court dans les feuilles mortes, joue avec des branches en bois, grave son nom sur un tronc d’arbre, … Et puis le soir, comme il se rend compte qu’il s’est très bien amusé, qu’il a été heureux, il dit à sa maman que c’est vrai, qu’il n’a pas besoin du jeu vidéo pour être heureux et qu’à partir de maintenant, ce qu’il veut c’est aller faire des balades dans les bois tous les jours. D’un point de vue d’adulte, cela peut paraître une très bonne idée. Cela semble même idéal de voir son enfant réaliser que les balades dans les bois sont un meilleur moyen de trouver le bonheur que les jeux vidéo et le but n’est pas d’entrer dans le débat de ce qui est mieux ou pas, mais plutôt de regarder le fonctionnement du mental, car après plusieurs jours de balades dans les bois, il y a beaucoup de chance pour que celles-ci ne lui procurent plus ce bonheur tant espéré. Et c’est normal, parce qu’encore une fois, il a projeté son bonheur sur un objet, il a de nouveau cru qu’il allait trouver ce bonheur quelque part. Et c’est ce fonctionnement-même, celui de croire que ce bonheur peut se trouver quelque part, à travers quelque chose, qui est source de malheur. Pour celui qui va promener tous les jours dans les bois par pur plaisir, par pur goût de la balade ou de la nature, et pas parce qu’il cherche quelque chose à travers ces balades, l’expérience sera toute à fait différente. Pour celui qui ne cherche rien, le bonheur est partout, quoi qu’il fasse. Il aura des préférences dans ses activités et ses loisirs, mais il ne projettera pas son bonheur, il ne croira pas que ces activités sont des conditions à son bonheur et c’est toute la différence.